Le procès actuellement en cours à Paris dans le cadre de l’horrible attentat contre Charlie Hebdo ne retiendra pas plus l’attention de l’opinion publique que tout autre procès ayant trouvé son origine dans un événement qui, au moment où il eut lieu, avait pour quelques jours, pris possession des petites lucarnes.
L’homme est ainsi fait qu’il oublie bien vite, perd d’une manière déconcertante l’intérêt pour les choses les plus graves.
La douleur, si elle existait au départ, est balayée par le cours ininterrompu d’événements nouveaux.
C’est l’une des raisons majeures pour lesquelles il n’y aura jamais une profonde mutation ethnique in melius.
J’ai toujours été frappé par le fait que l’holocauste, le crime le plus inimaginable jamais commis par des êtres humains, ne laisse en définitive que d’évanescentes réactions.
Normalement des gens qui entendent restaurer ne fût-ce que très partiellement l’ordre obscène, scélérat des années ténébreuses du fascisme et nazisme et qui refusent de dénoncer les horreurs d’Auschwitz, devraient connaître des hauts le cœur du matin au soir, suivis de violents mouvements de révolte.
On laisse faire ces salauds au nom d’une prétendue liberté d’opinion et d’expression.
D’aucuns, et ils sont nombreux, n’ont que de petites émotions quand on évoque le régime du gangstérisme, du chaos et du sang, pour rester dans la terminologie d’Antonio Scurati qui évoque la tyrannie du vide.
Finissons sur ces réflexions qui ne sont guère rassurantes.
Il y a la banalité tristement célèbre dont parlait Hannah Arendt, le mal troublant, normal, proche, quotidien de l’être humain.
Mais il existe, ajoute Tony Judt dans un texte décapant paru au Monde Diplomatique de juin 2008 (P. 22 et 23), une autre banalité : « celle de l’usage abusif – d’effet affadissant, désensibilisant à force de voir, de dire ou de penser la même chose trop de fois, qui engloutit notre public et l’immunise contre le mal que nous évoquons.
Le 04 septembre 2020.
Gaston VOGEL